Franck HENRY
Psychologue clinicien-psychothérapeute
Doctorant en psychologie à l’Université de Tours (37)
Membre associé du laboratoire de recherche EE 1901 « QualiPsy »
« Qualité de vie et santé psychologique »
Centre Hospitalier de Châteauroux – Centre Médico-Psychologique Pivot (pôle de psychiatrie adulte)
L’association internationale pour l’étude de la douleur (IASP) définit la douleur comme « une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable associée à, ou ressemblant à, celle associée à des dommages tissulaires réels ou potentiels » (Raja & al., 2020, p. 3). Une douleur récente, dite « aiguë », est considérée comme un signal d’alarme de l’organisme, particulièrement utile pour faire face à un dysfonctionnement physiologique avec la mise en place d’actions et de mesures appropriées. La douleur devient chronique avec une durée d’évolution au moins égale à trois mois et une réponse insuffisante aux traitements usuels, en dépit de la mise en place d’une démarche diagnostic appropriée. Cette douleur perd alors sa fonction adaptative, de système d’alarme, pour devenir autant inutile que délétère pour le bien-être de l’individu. A ce jour, plusieurs résultats d’études suggèrent que plus la capacité à prendre soin de soi est grande, plus le niveau de bien-être psychologique qui en résulte est élevé et plus la probabilité que les capacités de résilience observées après un stress soient optimales (Zessin & al., 2015). Les données actuelles de la littérature scientifique suggèrent le rôle potentiellement protecteur de l’autocompassion (encore appelée « bienveillance envers soi-même») pour prévenir l’apparition des douleurs chroniques ainsi que ses bienfaits en termes : d’autogestion réussie et durable de douleurs chroniques, de maintien voir d’amélioration du bien-être et de la qualité de vie en dépit de la persistance des douleurs (Aguerre & Henry, 2022). Kristen Neff (2003) définit l’autocompassion (ou « bienveillance envers soi-même ») comme » une qualité consistant à être touché par sa propre souffrance et à chercher à s’impliquer dans la réduction de ses propres difficultés « . L’autocompassion a trois facettes : un regard porté sur soi avec gentillesse (antagoniste à l’autocritique), une pleine conscience du moment présent (pas seulement focalisée sur la souffrance), et un sentiment d’appartenance à l’humanité qui permet de ne pas se sentir différent des autres et isolé du reste de l’humanité à cause de sa souffrance. Au cours de cette conference, nous développerons les bienfaits aujourd’hui connus de l’autocompassion sur la santé psychologique et somatique, en particulier chez les personnes souffrant de douleurs chroniques. Nous présenterons le modèle théorique de Paul Gilbert (2006) sous-tendant un entraînement à l’autocompassion et proposerons, notamment, des liens avec le modèle peur-douleur-évitement (Vlaeyen & Linton, 2000). À partir des données de la littérature et de notre experience clinique, nous aborderons les bienfaits à attendre de cet entrainement auprès de cette population (Aguerre & Henry, 2022). Nous terminerons notre presentation par une discussion de ses limites potentielles auprès des certaines personnes affectées par des douleurs chroniques. L’expérimentation d’une pratique d’autocompassion basée sur la pleine conscience viendra clôturer cette conference (Henry & Aguerre, 2023b).